Introduction

Trente-cinq ans après la clôture officielle du Concile Vatican II, il subsiste au cœur de l’Eglise catholique une vive blessure de division, à l’heure même pourtant où tant d’efforts sont faits en faveur de l’unité des chrétiens, qui, hélas, se cantonne, dans l’esprit de beaucoup, à la seule recherche de rapprochements de l’Eglise catholique avec les orthodoxes et les protestants. En effet, ceux qui, à la suite du schisme de Mgr Lefebvre, ont eu le courage de rester dans l’Eglise, ne sont pas pour autant pleinement intégrés en son sein. En témoignent l’absence de toute action pastorale commune ainsi que les réticences fortes des diocèses à accueillir les communautés ou les prêtres traditionalistes. De l’autre côté, les traditionalistes sont souvent tentés par un repli sur eux-mêmes, évitant de se mêler à une vie diocésaine qui leur parait non conforme à l’Eglise authentique. Les exemples sont malheureusement fort nombreux de refus, d’exclusions et d’incompréhensions réciproques.

Ainsi existe-t-il toujours un réel fossé entre ce qui est plus que deux " sensibilités " dans l’Eglise. Et force est de s’interroger et de se remettre en cause à la recherche de la parfaite unité, pour la plus grande gloire de Dieu. La blessure de ces incompréhensions ne peut être soignée que par un dialogue profond, un dialogue sous le regard de Dieu et fécondé par l’Esprit dans le seul but de mieux faire connaître le Fils à notre monde. " Qu’ils soient uns comme mon père et moi nous sommes un, afin que le monde croie ". Pour qu’il puisse y avoir dialogue fécond dans le respect mutuel, il faut accepter d’avancer vers la pleine vérité, ce qui implique de reconnaître ses éventuelles erreurs d’appréciation et par-dessus tout de refuser les jugements hâtifs. Il faut aussi éviter de se formaliser des différences de style et de langage qui ne sont que le reflet d’une réalité assez superficielle.

Ces quelques pages n’ont d’autre ambition que d’apporter leur contribution à la réconciliation entre " tradis " et " Eglise conciliaire ". La difficulté de la tâche est à la hauteur de la profondeur de la blessure d’une Eglise en crise dans le cœur de qui l’aime par dessus tout. Le propos n’est pas ici de faire le procès du traditionalisme. " Il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père ". Oui, il y a une place dans l’Eglise pour ceux qui restent attachés à certaines traditions ; à la condition cependant que ceux qui se sont définis au départ en réaction au concile Vatican II, délaissent définitivement les critiques à son égard, en y reconnaissant l’expression du Magistère de L’Eglise.

Les deux premières parties de cet essai sans prétention chercheront à avancer quelques analyses et pistes de réflexion dans cette optique de la reconnaissance pleine et entière de Vatican II, qui est absolument nécessaire pour lever les malentendus, approfondir les discussions de fond et permettre enfin la pleine communion. La troisième partie cherchera à trouver quelques actions et orientations concrètes qui pourront aller, de manière palpable, dans le sens de cette pleine communion. Celle-ci exige, une fois les injustes préventions définitivement levées, de changer certaines mentalités des les deux " bords " pour pouvoir enfin bâtir quelque chose de réellement positif, en posant des actes concrets, des actes d’Eglise.

Première partie

Découvrir la parfaite doctrine catholique dans Vatican II

Pour lever les malentendus, une base commune est nécessaire. Le dernier Concile doit être la référence et le sujet principal de la réflexion, étant donné que c’est de lui que sont nées, ou qu’ont été mises en pleine lumière, tant de divergences et d’incompréhensions.

Mais qui a lu véritablement Vatican II ? Les fréquentes aberrations entendues ou lues à son sujet laissent supposer que ceux qui le connaissent autrement que par des idées a priori doivent être peu nombreux. Ceux qui le voient à travers les excès provoqués par une compréhension erronée font la même erreur que les auteurs mêmes de ces déviances : ils prennent le concile pour ce qu’il n’est pas. En effet, ces déviances se réclament de l’esprit de Vatican II tout en contredisant directement son contenu, nous allons le montrer. Croire qu’elles en sont le reflet conduit effectivement logiquement à la condamnation du Concile. Et les traditionalistes qui se sont définis en réaction aux aberrations et à l’anarchie – n’ayons pas peur de le dire – qui a suivi le Concile, doivent absolument reconnaître que le contenu de celui-ci n’en est pas la cause. Ainsi sera-t-il possible de retrouver un regard serein sur les textes magnifiques du dernier Concile, seuls dignes de foi.

1. Le Concile contre l’esprit du Concile

Il est vrai qu’il existe un certain nombre de fidèles ou de membres du clergé qui justifient la totale prise de liberté par rapport au magistère et à la doctrine en évoquant " l’esprit du Concile ". Celui-ci est caractérisé selon eux par la réconciliation totale de l’Eglise avec le monde et ses évolutions. Cela les amène à supprimer de leur foi tout ce qui peut déranger notre société, et en premier lieu la transcendance d’un Dieu sauveur, et réduit leur religion à un humanisme comme un autre, pastorale étant alors synonyme d’action sociale ; Jésus n’est alors plus qu’un homme exemplaire dénué de divinité. La caricature n’est ici qu’à peine forcée.

Qu’on lise Duquesne, que l’on se rappelle l’affaire Gaillot ou que l’on observe l’actuel mouvement " Nous sommes l’Eglise ", on constate que toutes ces contestations ne sont que tentatives désespérées pour montrer au monde que l’Eglise a ôté de sa foi et de sa vie tout ce qui va en contradiction avec lui, et qu’elle a adopté ses " avancées ". Avancées en terme de rationalisme : la vierge Marie ne peut scientifiquement être vierge, on va donc démontrer que Jésus avait des frères selon la chair (Duquesne), avancées en terme de mœurs : le débat sur l’homosexualité a été un des principaux détonateurs de l’affaire Gaillot, avancées politiques, on veut " démocratiser " l’Eglise (mouvement Nous Sommes L’Eglise), etc.

Mais tout ceci est en parfaite contradiction avec l’enseignement du concile. Si celui-ci a voulu reconsidérer ses jugements sur le monde moderne au vu des nouvelles conditions créées par les bouleversements du siècle, et s’il a voulu reconnaître ce qu’il y a de bon dans nos sociétés modernes, ce n’est que pour mieux y envoyer l’Eglise en mission. Car, à la fois " assemblée visible et communauté spirituelle "(1), l’Eglise " fait route avec toute l’humanité et partage le sort terrestre du monde ; elle est comme le ferment et, pour ainsi dire, l’âme de la société humaine appelée à être renouvelée dans le Christ et transformée en famille de Dieu "(2).

Il est vrai que la constitution Gaudium et Spes pèche parfois par excès d’optimisme dans une perception très positive des évolutions du monde, et en particulier de la mondialisation. En prenant le parti de s’ancrer résolument dans une analyse du monde tel qu’il était en 1965, elle prenait le risque de manquer de recul et d’être vite dépassée par les événements. Dans une note au début de la Constitution, les Pères préviennent que " les sujets traités, régis par des principes doctrinaux, ne comprennent pas seulement des éléments permanents, mais aussi des éléments contingents ".

Ainsi, pour le Concile, la vocation universelle (catholique) et missionnaire (apostolique) de l’Eglise ne fait nullement l’objet de remise en cause ; et si elle fait partie du monde, étant constituée d’êtres de chair, elle doit œuvrer à le transformer et lui annoncer la Bonne Nouvelle, en qualité de corps mystique du Christ qui lui a légué le " mandat solennel d’annoncer la vérité qui sauve "(3) .

Au-delà de la catholicité et du caractère apostolique de l’Eglise, les autres " notes fondamentales de l’Eglise " (Une, Sainte, Catholique et Apostolique) font aussi l’objet de remise en cause. La nécessaire sainteté de l’Eglise, idée qui parait si désuète voire obscurantiste – cf. certains commentaires au moment de la Repentance de Jean-Paul II –, est tout simplement niée par ces tenants du faux " esprit du Concile " alors que la constitution Lumen Gentium y revient incessamment. Un chapitre entier lui est consacré, le chapitre V intitulé " La vocation universelle à la sainteté dans l'Eglise ".

Quant à l’œcuménisme (unité), il a parfois été confondu avec la suppression de tout ce qui fait la spécificité de l’Eglise catholique en matière de contenu de foi, un œcuménisme du plus petit dénominateur commun. Ceci est là encore en parfaite contradiction avec le Décret " Unitatatis Redintegratio " sur l’œcuménisme qui précise bien qu’il " faut absolument exposer clairement la doctrine intégrale ", car " rien n’est plus étranger à l’œcuménisme que ce faux irénisme qui cause dommage à la pureté de la doctrine catholique et obscurcit son sens authentique et incontestable "(4). On entend aussi fréquemment, au nom du dialogue interreligieux, que toutes les religions se valent. Mais lisons le Concile !

Cette vision ecclésiologique faussée associée à une mauvaise compréhension de certains articles du Concile tel celui sur le sacerdoce commun des fidèles, a provoqué, il est vrai, un mouvement de contestation proche du temps de la Réforme : abandon de la foi en la présence réelle, critiques violentes du sacerdoce, du magistère (mouvement Nous sommes l’Eglise), etc., preuve pour certains de la mauvaise orientation du Concile Vatican II. Or, les rappels dogmatiques des constitutions Lumen Gentium et Dei Verbum, s’ils sont simplement exprimés, sont d’une clarté sans appel. Certains tenants de ces mouvements, constatant cette opposition radicale entre les textes du concile et l’esprit qu’ils croient en être l’inspirateur, sont tout naturellement arrivés à réclamer à l’Eglise un nouveau concile, qui, cette fois, intégrerait les " avancées " que les Pères du précédent auraient souhaitées, tout en écrivant l’opposé(5)

De tels sophismes ne représentent pas la pensée de l’Eglise. Et si l’ampleur du mouvement ainsi que le manque de vigueur de protestation des évêques a pu laisser croire le contraire à certains, ceux-là se doivent de ne pas mettre en doute la hiérarchie de l’Eglise ; ils doivent être persuadés que ce qu’elle écrit, sous l’action de l’Esprit Saint qui ne lui fait jamais défaut, et surtout pas dans un concile œcuménique, est la pensée authentique de l’Eglise catholique.

2. Un Concile novateur ?

Il est malheureusement définitivement acquis pour un certain nombre que le concile n’est pas conforme à la doctrine traditionnelle de l’Eglise et en particulier au Concile de Trente et au Concile Vatican I. C’est souvent le présupposé à toute conversation avec les traditionalistes. Or ceci fait preuve tant d’un manque d’étude sérieuse du concile Vatican II que d’une vision faussée de l’Eglise et du magistère.

Le contenu doctrinal de Vatican II n’a été que tardivement contesté par ses actuels détracteurs. En témoignent les écrits de Monseigneur Lefebvre pendant la durée du concile et même dans son voisinage immédiat. Par exemple, dans un supplément à la revue " Itinéraires " intitulé " Après la IIe session du Concile, faisons le point sous la conduite du successeur de Pierre ", il écrit : " Nous vivons des moments où le surnaturel, où l’action de l’Esprit Saint est visible, tangible. Qu’on interroge les observateurs du Concile ; ils n’auront pas de termes assez expressifs pour nous féliciter et nous envier d’avoir un Evêque à qui a été donné le pouvoir suprême sur l’Eglise, un Evêque vers qui nous tourner lorsque le doute ou les ténèbres nous accablent et en qui nous sommes assurés d’avoir la Lumière ". Il avait d’ailleurs lui-même signé finalement tous des textes du concile, même s’il ne les avait pas tous votés.

Ce n’est que plus tard, vers 1970-1972, au vu des excès apparemment provoqués par le concile, qu’abandonnant son attitude première de défense d’une interprétation authentique du Concile en se référant aux actes de Paul VI, il adopte une attitude radicalement critique. La collégialité, la liberté religieuse et l’œcuménisme sont compris comme l’expression d’une " tendance néo-moderniste et néo-protestante " puis, c’est le Concile dans son entier qui tombe sous le coup de la suspicion d’être en lui-même non conforme à la tradition. Ainsi peut-il affirmer au Figaro le 3 août 1976 que " ce concile, tournant le dos à la tradition et rompant avec l’Eglise du passé, est un concile schismatique ".

Un tel glissement du discours est vraiment révélateur du manque de fondement des accusations de Mgr Lefebvre. De la dénonciation de la mauvaise interprétation de Vatican II, il en vient à accuser le concile lui-même d’être porteur de ces déviances. En 1978, il franchit à nouveau l’illogisme dans l’autre sens en déclarant qu’il est " prêt à signer une déclaration acceptant le Concile Vatican II interprété selon la tradition ", pour finalement rompre définitivement avec Rome. Mais laissons là Mgr Lefebvre et ses outrances. Cependant, ceux qui, attachés d’abord à lui, refusèrent de le suivre dans sa démarche schismatique n’ont pas pour autant toujours abandonnés la critique.

Cette critique n’est pas d’ailleurs seulement exprimée envers le concile de Vatican II mais aussi envers " toutes les réformes qui en sont issues ", réformes qui ont d’ailleurs toutes été promulguées validement, juridiquement parlant, par le pape. C’est, outre la contradiction totale avec l’extrait cité plus haut à propos du Pape, un manquement grave à la foi envers le Magistère. Une voie pour se justifier était alors de chicaner sur les conditions de validité des promulgations des réformes : ainsi la réforme liturgique n’ayant pas été promulguée " ex cathedra ", elle ne peut être digne de foi et obligation nous est faite de se méfier ; car si le pape n’a ainsi voulu engager son infaillibilité, c’est qu’il avait bien conscience des erreurs doctrinales qu’elle renfermait. Beau raisonnement oh combien répandu !

Adhérer à ceci, c’est tout simplement douter, en ce qui concerne les décrets d’application, du magistère pontifical ordinaire. Pour de tels décrets, le magistère pontifical extraordinaire (infaillible), qui s’exerce quand le Saint Père s’exprime ex cathedra, n’a pas lieu d’être engagé. En effet, ce mode d’exercice du magistère s’utilise, selon la définition du concile Vatican I " lorsqu’elle (l’Eglise) définit la doctrine sur la foi et les mœurs "(6), ce qui n’est pas le cas ici. Le magistère pontifical ordinaire n’exige pas moins des fidèles " l’assentiment religieux de la volonté et de l’intelligence ".

Douter du contenu dogmatique de Vatican II, c’est douter de la forme universelle et extraordinaire du Magistère se manifestant lors des conciles œcuméniques. C’est douter justement de ce que l’Eglise est et restera " l’Eglise de toujours ", c’est-à-dire le corps mystique du Christ, qui lui a envoyé son Esprit Saint et qui lui a fait la promesse que " les forces du mal ne l’emporteront pas sur elle ". Si un concile œcuménique, où le Collège des évêques est réuni en communion pleine et entière avec le pape, et les lois qui en découlent peuvent être sujettes à un doute quant à la sûreté de leur doctrine et à leur conformité avec la tradition de l’Eglise, il n’y a plus alors qu’à fermer boutique, l’Eglise n’étant plus l’Eglise.

Un Concile novateur, donc ? Oui, sûrement, dans ce sens où il propose des formes nouvelles ou tombées en désuétude depuis des siècles pour annoncer l’Evangile à un monde très complexe et qui a considérablement évolué en un siècle, ainsi que pour tenir compte de la très grande diversification des situations ecclésiales à travers le monde. Va-t-on aborder de la même façon la question de la liberté religieuse dans la France encore très catholique de la fin du XIXe siècle et dans la Chine communiste de la fin du XXe ? Mais il est bien certain que ces adaptations, avec le sens que leur donnent le " petit Robert " qui est " approprier, mettre en harmonie avec ", sont au service de l’Evangélisation. Le Concile n’est-il pas un concile Pastoral ? Les adaptations mises en œuvre par Vatican II, prennent pour modèle la façon dont les Apôtres ont adopté les structures de leurs temps pour mieux le pénétrer en profondeur, et ne se sont en aucun cas faites au prix d’un appauvrissement, d’un reniement ou d’une quelconque innovation théologique.

C’est donc un acte de foi autant que de raison que d’admettre le Concile Vatican II comme conforme à la grande Tradition de l’Eglise en même temps que n’étant pas porteur en lui-même des excès nés de sa mauvaise compréhension.

3. L’adhésion de la foi envers le Concile

La critique envers le Concile ne revêt pas toujours un caractère fondamental et absolu, et il existe une très grande variété d’attitude au sein même des communautés traditionalistes. Cela dit, des sujets comme la liberté religieuse, la collégialité, l’Oecuménisme ou encore le dialogue interreligieux, sont des constantes parmi les motifs de réticences et de récriminations. Il serait trop long de les aborder ici, bien qu’ils soient d’une grande importance. Mais en toutes ces questions, qui ne sont pas simples, et qui souvent se prêtent à des simplifications erronées et dangereuses, il faut se montrer particulièrement attentif à ce qu’en dit le Magistère de l’Eglise, tant dans les textes du Concile que dans l’enseignement des papes.

Le Concile et l’Esprit Saint

La référence au magistère du dernier Concile et des papes qui ont suivi devrait suffire à faire disparaître les réticences provoquées par les positions suspectées de n’être pas conformes à la doctrine traditionnelle de l’Eglise. Mais quand on en appelle à l’adhésion de Foi demandée vis-à-vis du Concile pour résoudre ces questions, en considérant l’aide apporté par l’Esprit Saint au Concile, on se heurte parfois à la grave affirmation d’un prétendu illuminisme de Vatican II, qui aurait invoqué sur lui l’envoi de l’Esprit saint comme pour une nouvelle Pentecôte, privilège qui n’a pourtant été attribué qu’aux seuls apôtres ; les affirmations du Concile ne seraient ainsi pas digne de foi au même titre que les précédents concile, et l’on pourrait à juste titre se méfier.

Les premières lignes de la constitution dogmatique Dei Verbum citent la parole de saint Jean : " Quand il écoute religieusement et proclame hardiment la parole de Dieu, le saint Concile obéit aux paroles de saint Jean " Nous vous annonçons la vie éternelle, qui est auprès du Père et qui nous est apparue : ce que nous avons vu et entendu, nous vous l’annonçons, afin que vous soyez vous aussi en communion avec nous, et que notre communion soit avec le Père et avec son Fils Jésus-Christ " (I Jo. 1, 2-3)(7) ". Cette phrase serait la preuve que le Concile se réclame de l’expérience même des apôtres. Mais la phrase se poursuit. Le Concile ajoute : " c’est pourquoi, marchant sur les pas du Concile de Trente et du premier Concile du Vatican, il se propose de présenter la doctrine authentique sur la révélation divine et sa transmission, pour que, grâce à cette proclamation du salut, le monde entier croie en écoutant, espère en croyant, aime en espérant ". Ainsi le Concile se place-t-il dans la lignée des Conciles précédents et se met-il à leur école.

Mais d’où vient l’autorité du Concile et son inspiration ? La réponse est donnée au chapitre deuxième : " La Tradition sacrée et la Sainte Ecriture constituent l’unique dépôt sacré de la parole de Dieu qui ait été confié à l’Eglise [...]. Mais la charge d’interpréter authentiquement la parole de Dieu écrite ou transmise a été confiée au seul Magistère vivant de l’Eglise, dont l’autorité s’exerce au nom de Jésus Christ. Ce Magistère n’est pas au-dessus de la parole de Dieu ; il la sert, n’enseignant que ce qui a été transmis, puisque, en vertu de l’ordre divin et de l’assistance du Saint-Esprit, il écoute pieusement la parole, la garde religieusement, l’explique fidèlement, et puise dans cet unique dépôt de la foi tout ce qu’il nous propose à croire comme étant divinement révélé "(8).

Ainsi les Pères du Concile ne prétendent-ils aucunement recevoir la révélation directement dans leur conscience, mais ils réaffirment que les Conciles et les papes reçoivent l’assistance de l’Esprit Saint pour accomplir leur mission " d’expliquer fidèlement " la parole de Dieu, de même que les Conciles et papes précédents l’ont reçu.

L’obéissance au pape et au Concile

Le grand paradoxe de cette contestation du Concile est révélé, comme le souligne le cardinal Ratzinger, par le problème de l’attitude à adopter à l’égard du Souverain Pontife. En effet, d’une part le très grand attachement au siège de Pierre et au dogme de l’infaillibilité pontificale et d’autre part la constatation du total accord entre les papes Paul VI puis Jean-Paul II avec le concile, menait forcément à un dilemme. La tendance que l’on trouve parfois encore chez certains, et qui est très flagrant dans la Fraternité saint Pie X, est à l’instauration d’une dichotomie entre le Siège de Pierre et celui qui l’occupe. L’obéissance, toute théorique, au Siège de Pierre commanderait de désobéir au pape en place, ou au moins de ne pas tenir compte de ce qu’il dit quand il prend des positions qui semblent choquantes. Pourtant la seule et vraie obéissance s’exerce dans la pratique.

Or, depuis le Motu proprio Ecclesia Dei de 1988 reconnaissant la légitimité de célébrer l’ancien rite, le problème de l’obéissance au pape, pour ceux du moins qui en ont accepté les clauses et ont rompu avec le schisme, se pose différemment. En vivant pleinement la grâce de leur liturgie dans le cadre de ce qui leur est offert, les traditionalistes sont réellement dans l’obéissance, contrairement à la situation antérieure à 1988. Mais un des dangers serait peut-être de croire à une légitimation par le pape, non seulement de l’utilisation du missel de 1962 et d’un mode de vie conforme à ce qui se faisait avant le Concile, mais aussi de l’attitude de refus de Vatican II. Jean-Paul II met pourtant en garde de rompre sinon de fait du moins de cœur avec le Magistère : " C'est surtout une notion de la Tradition, qui s'oppose au Magistère universel de l'Eglise, lequel appartient à l'évêque de Rome et au corps des évêques, qui est contradictoire. Personne ne peut rester fidèle à la Tradition en rompant le lien ecclésial avec celui à qui le Christ, en la personne de l'apôtre Pierre, a confié le ministère de l'unité dans son Eglise"(9).

Autant le passage de la désobéissance à l’obéissance en terme de droit et de légalité s’est fait en un seul jour pour la partie la plus visible du traditionalisme, à savoir le maintien de l’ancienne liturgie, le passage de la " désobéissance " à " l’obéissance " dans l’acceptation du Concile ne pourra se faire en un seul jour. C’est un véritable travail de profondeur et de longue haleine pour convertir le cœur et l’intelligence à la pensée authentique de l’Eglise, exprimée dans le dernier Concile, en continuité avec la Tradition.

Il est dur pour ceux qui ont cru obéir à " l’Eglise de toujours " en n’adhérant pas au Concile de se faire taxer de désobéissance à cette même Eglise, alors que d’autres l’ont été encore plus sans encourir les mêmes blâmes. Néanmoins, quelle autre mot employer ? Refuser délibérément l’expression du Magistère et le considérer comme fourvoyé, c’est bien un manque de docilité, un manque de confiance.

Puissent ces phrases ne pas blesser ceux qui ont déjà payé tout leur tribut de souffrances à l’amour de l’Eglise. Car le paradoxe et toute l’injustice est que c’est là où l’amour de l’Eglise et l’attachement à la doctrine catholique était parmi les plus élevés que s’est glissé le doute envers le Magistère vivant de l’Eglise. Ceux qui voulaient préserver la Foi pure de toute souillure ont-ils manqué de foi comme tant d’autres ?

Aimer le Concile

Ainsi le cardinal Ratzinger ne voit-il " aucun avenir pour une position de refus fondamental à l’égard de Vatican II, en soi illogique ". Pour lui, " Le point de départ de ce courant est sans doute une fidélité stricte au magistère surtout de Pie IX et de Pie X, ainsi que – d’une manière encore plus fondamentale – au concile Vatican I et à sa définition de la primauté du pape. Mais pourquoi les papes jusqu’à Pie XII et non après ? Serait-ce que l’obéissance au Saint-Siège varie au gré des années ou de la proximité entre un enseignement donné et certaines conviction personnelles ? "(10).

Si on voulait rassembler de façon lapidaire les éléments essentiels qui plaident pour une acceptation pleine et entière du Concile Vatican II, on dirait :

1- que les excès qui ont fait suite au Concile n’ont pas leur cause dans celui-ci, car ils s’opposent directement à la lettre et à l’authentique esprit du Concile,

2- que l’étude approfondie des textes du Concile montre son insertion parfaite dans la grande Tradition de l’Eglise et de Pères, ainsi que les réformes qui en sont issues, et en particulier celle de la liturgie(11),

3- que le Magistère de l’Eglise qui s’est exprimé dans le Concile et par les papes Paul VI et Jean-Paul II réclame l’adhésion du cœur et de l’intelligence de tous.

Ceci dit de manière abrupte, il est tout à fait compréhensible que des esprits attachés par dessus tout à l’Eglise et qui ont été profondément meurtris par la grande crise post-conciliaire, dont on n’émerge qu’à peine aujourd’hui, aient été tentés d’en faire porter la responsabilité sur le Concile. Celui-ci semblait s’opposer à la Tradition, et effectivement dans la pratique, engendrait en son nom des déviances graves et contraire à tous les enseignements des papes, des saints et des deux derniers Conciles : anarchie liturgique, reniements dogmatiques, ralliements à des thèses non catholiques, en particulier du marxisme, etc. Le premier mouvement d’horreur devant ces " abominations ", réaction en soi saine, aurait dû laisser la place, dans un second temps, à l’étude sereine des vraies causes de la crise et des textes du Concile. Mais comment trouver la sérénité nécessaire en cette période de déchaînement et cette ambiance de révolution ?

*

Ce travail difficile d’amour et d’adhésion au Concile Vatican II, car il faut l’aimer autant qu’y adhérer dans la foi raisonnée, a déjà été entrepris sur un certain nombre de sujets par certaines communautés de rite traditionnel. Ainsi tout récemment un moine du Barroux, le père Basile, a soutenu à Rome puis édité une thèse de doctorat ayant pour titre La liberté religieuse et la tradition catholique, un cas de développement doctrinal homogène dans le magistère authentique(12). Puisse cet exemple être suivi par l’ensemble des traditionalistes !

Deuxième partie

La liturgie de Vatican II est-elle recevable ?

La liturgie, de par son rôle prépondérant dans la vie de l’Eglise, a été à la fois le révélateur, la conséquence et aussi la cause des dissensions qui ont été évoquées plus haut. En ce sens il n’y aurait rien à ajouter à ce qui a été dit. Ici aussi le point de départ de la contestation de la liturgie dite de Paul VI a été souvent l’anarchie liturgique qui a suivi le Concile. On pourrait là encore mettre l’accent sur la nécessité de reconnaître que les textes de la " nouvelle " liturgie ne comportent pas d’erreurs doctrinales, étant l’expression authentique du Magistère. Mais le problème est plus complexe, étant donné que s’il ne s’agit pas d’un changement de doctrine il s’agit réellement d’un changement des rites de la Liturgie, considérés par certains comme invariables ou du moins, pas dans les conditions dans lesquels ce changement a été opéré ou pas de manière si profonde.

Le propos n’est pas ici de discuter de la légitimité de célébrer encore la messe dite " tridentine ", puisque l’autorisation du pape en a été donnée, et que l’on ne peut rien reprocher à cette belle liturgie, sinon de posséder des limites mises en lumière par le dernier Concile – Mais une liturgie, en tant qu’œuvre humaine ne peut que tendre vers la perfection, même si la perfection divine est atteinte dans le sacrement lui-même. Ce qui n’en fait pas le manifeste de l’obscurantisme religieux que certains récrient. Ce serait considérer le Concile comme une victoire de l’Eglise du présent sur l’Eglise du passé, ce qui serait totalement absurde. Le propos est ici de montrer qu’une réforme était nécessaire et qu’elle à été préparée par l’action de nombreux Pontifes, ainsi que de montrer que la messe de Paul VI est légitime et respecte la Tradition, de manière à " cesser la guerre de la Liturgie ".

1. La longue histoire de la réforme liturgique

Les traditionalistes donnent souvent une image fixe de la liturgie anté-conciliaire. Or, depuis la réforme tridentine, elle a beaucoup plus fluctué qu’on ne le pense souvent. De plus, la liturgie du concile de Trente, si elle n’apportait que peu de changements par rapport au précédent missel d’Innocent III, était loin d’être identique aux liturgies des débuts du christianisme et du début du moyen âge. Ainsi le concept de la " messe de toujours " n’a-t-il aucun fondement.

On argue aussi parfois du fait que la liturgie tridentine est irréformable, compte tenu du fait qu’elle avait été promulguée " non varietur " en stipulant bien qu’en aucun temps ni en aucun lieu on ne pourra en aucun point la modifier. A ceci, on répond que ce que l’Eglise a lié, l’Eglise peut le délier. Et les papes qui ont opéré des réformes de cette liturgie n’en ont jamais conçu aucun scrupule. Cette phrase n’est donc pas à interpréter comme étant destinée aux papes et aux conciles futurs ; elle s’adresse aux fidèles et au clergé qui serait tentés de conserver la liturgie dont ils faisaient usage avant que celle du concile de Trente leur soit imposée, ou bien de modifier celle-ci de leur propre chef.

La restauration liturgique voulue par le dernier concile est l’aboutissement d’un mouvement de réforme qui ne date pas d’hier. C’est au milieu du XIXè siècle que le grand inspirateur de la réforme liturgique, Dom Guéranger, abbé de Solesmes, se lança à l’assaut des multiples liturgies gallicanes qui s’étaient développées en France. Il s’agissait alors de retrouver la pureté des origines. C’est dans les réformes de saint Pie X que ce dessein se voit réalisé. Du moins, n’était-ce qu’un début. En effet, saint Pie X entrevoyait la nécessité d’entreprendre une réforme plus profonde que celle qu’avait opérée le concile de Trente, qui était conçue pour affirmer une tradition encore récente face aux graves mises en doute par les Protestants du caractère sacrificiel de la messe, du sacerdoce ministériel, ainsi que de la présence réelle(13).

C’est ainsi qu’il institua une commission chargée de cette réforme, réforme dont il prévoyait l’ampleur et la longueur, et qu’il initia par la restauration de la célébration du dimanche et par la réforme du Bréviaire romain. Ainsi affirmait-il : " En vérité tout cela exige, selon le jugement des experts, un travail aussi étendu par son ampleur que par le temps qu’il demandera ; aussi est-il nécessaire que passent de nombreuses années avant que cet édifice liturgique [...] apparaisse de nouveau dans la splendeur de sa dignité et de son harmonie, une fois nettoyé des enlaidissements dus à l’âge "(14). Le grand axe directeur de cette réforme est défini par lui comme étant de permettre une " plus grande participation active aux mystères sacrosaints et à la prière solennelle de l’Eglise " des fidèles(15).

C’est ce dessein qui a été repris par Pie XII. Il favorisa la meilleure intelligence de la prière des psaumes en révisant le psautier, assouplît le jeûne eucharistique pour permettre à plus de fidèles de communier, étendit l’usage de la langue vivante dans le rituel, et surtout modifia de manière conséquente le Missel en restaurant la veillée pascale et la Semaine sainte(16). Puis ce fut Jean XXIII qui annonça en éditant le Missel romain de 1962 la future réforme de l’ensemble de la liturgie dont les principes devront êtres arrêtés par les pères du prochain Concile œcuménique.

2. La restauration liturgique de Vatican II

Le concile, par la Constitution dogmatique Sacrosanctum Concilium(17) sur la sainte Liturgie, répondit aux grandes aspirations des Pontifes en posant les principes directeurs de la restauration liturgique. Celle ci devra permettre une plus grande participation des fidèles, une meilleure intelligence des rites qui devront " exprimer avec plus de clarté les réalités saintes qu’ils signifient "(18), un plus grand accès aux saintes Ecritures ainsi qu’un recentrage de la vie liturgique autour du mystère pascal(19).

Ces directives furent fidèlement suivies lors de la réforme elle-même, promulguée par les décrets de la Congrégation des Rites. La meilleure participation des fidèles a été permise, comme l’avait voulue la Constitution Sacrosanctum Concilium, par l’usage de la langue vernaculaire dans les célébrations. Cet usage n’est d’ailleurs pas obligatoire, sauf pour les lectures. Une simplification des rites à été opérée. Ceux-ci ont été épurés de quelques ajouts qui les ont, au cours des siècles, alourdis sans grande utilité : des répétitions inutiles ont été supprimées de manière à ce que " les rites manifest[ent] une noble simplicité "(20). C’est pourquoi le Concile n’emploie pas le mot de réforme liturgique mais de restauration.

Point d’appauvrissement dans tout ceci. Est-ce un appauvrissement par exemple que de ne réciter qu’une fois le " Domine non sum dignus " plutôt que trois ? Les rites de la messe, par ces simplifications et les regroupements qui ont eu lieu, ont gagné en cohérence interne et en unité : rites initiaux, liturgie de la Parole, liturgie eucharistique, rite de conclusion. C’est dans cette optique que le " dernier Evangile ", par exemple, a été supprimé. En revanche, la liturgie de la Parole a été considérablement développée : " Pour présenter aux fidèles avec plus de richesses la table de la parole de Dieu, on ouvrira plus largement les trésors bibliques pour que, dans un nombre d’années déterminé, on lise au peuple la partie la plus importante des Saintes Ecritures "(21). C’est ainsi que trois lectures sont désormais lues les dimanches et fêtes et qu’à chaque jour de l’année correspond une Epître et un Evangile propres, une rotation sur trois années ayant lieu.

3. Le nouvel Ordo Missae : " selon l’ancienne norme des Pères ".

Pour les Pères du Concile, toutes ces réformes se doivent de respecter la tradition. Elles doivent être établies, selon les mots mêmes de Saint Pie V, " selon l’ancienne norme des saints Pères "(22). A ce propos il semble utile de citer abondamment le texte même du Concile. Voici reproduit un paragraphe presque entier intitulé, dans l’édition française, " progresser en respectant la tradition ". " Afin que soit maintenue la saine tradition, et que pourtant la voie soit ouverte à un progrès légitime, pour chacune des parties de la liturgie qui sont à réviser, il faudra toujours commencer par une soigneuse étude théologique, historique, pastorale. En outre, on prendra en considération aussi bien les lois générales de la structure et de l’esprit de la liturgie que l’expérience qui découle de la plus récente restauration liturgique et des indults accordés en divers endroits. Enfin, on ne fera des innovations que si l’utilité de l’Eglise les exige vraiment et certainement, et après s’être bien assuré que les formes nouvelles sortent des formes déjà existantes par un développement en quelque sorte organique "(23).

C’est sur ce dernier point que se sont portées nombre de critiques. Les " innovations " étant jugées trop radicales, en rupture avec le caractère " organique " requis pour l’évolution de la liturgie. Pour le prouver, certains se contentent d’avancer qu’une réforme de cette ampleur, par le nombre d’éléments modifiés et par la rapidité de son élaboration, ne peut être qu’en rupture avec " l’organicité " du développement de la liturgie. S’il est vrai qu’une réforme d’une telle importance et aussi spectaculaire par le nombre de rites modifiés et par l’aspect très visible des changements ne s’est jamais vue dans l’Eglise, l’étude rite par rite des évolutions permet d’en relativiser l’ampleur. De plus il est difficile d’introduire ici une notion de degré. A partir de quelle " quantité " de modifications le caractère organique est-il rompu ?

Quant à sa rapidité d’élaboration, il est illusoire de croire que la réforme a émergé du néant entre 1963 et 1970. En fait elle à été préparée depuis le début de ce siècle, en particulier par le " renouveau biblique " et la " recherche ecclésiologique "(24) qui se sont manifestés, par exemple, par la découverte de textes anciens, en particulier sur l’Eglise des premiers siècles(25). Il est cependant vrai que la rapidité de l’application de la réforme, application le plus souvent fantaisiste, dans sa forme la plus radicale (abandon total du latin, etc.), a pu voiler, et même briser, le lien d’homogénéité entre les deux formes du rite romain.

Ainsi ces seuls arguments ne sont pas suffisants. En revanche, abordant de manière interne l’évolution de chacun des rites, certaines interrogations semblent faire mouche : La concélébration n’est-elle pas une complète innovation ? L’introduction de nouvelles Prières eucharistiques (ou canons) n’est-il pas une offense à ce qu’il y a de plus sacré et de plus intouchable ? Avant de répondre, il semble nécessaire de dire quelques mots de ces fameuses introductions. Car on se rend compte qu’elles sont souvent mal connues de ceux qui ne fréquentent que la messe dans le rite tridentin.

Les nouvelles Prières eucharistiques

L’introduction de trois nouvelles Prières eucharistiques (avec le Canon romain devenu la première prière eucharistique, elles sont au nombre de quatre) a beaucoup dérouté, voire scandalisé. Tout d’abord, le fait que le Canon romain ait été pendant quatre siècles la seule Prière eucharistique en vigueur dans l’Eglise Catholique ne doit pas faire oublier qu’il en existait une grande variété, notamment dans les premiers siècles. Le Concile, dans sa volonté d’enrichir la prière de l’Eglise par une plus grande diversité de formules a engendré l’introduction de ces trois Prières eucharistiques.

De ces trois Prières, l’une est ancienne (canon 2) et les deux autres sont de composition récente. La deuxième Prière eucharistique reprend, en la modifiant légèrement, l’anaphore d’Hippolyte, un prêtre romain du IIIe siècle. Cette anaphore (le synonyme oriental de canon) est une des plus anciennes que l’on connaisse et a été redécouverte au début du XXe siècle. " L’innovation " n’a ici consisté qu’à compléter les quelques parties manquantes. La troisième et la quatrième Prière eucharistique ont été certes composées récemment. Cependant elles reprennent exactement la structure générale des anaphores classiques et utilisent un langage pétri de celui des Ecritures, des Pères de l’Eglise ainsi que de celui de la liturgie. La Prière eucharistique III se réfère directement au Canon romain ; comme lui, elle met très fortement en valeur le caractère sacrificiel de l’eucharistie. La quatrième, sans pour autant escamoter ce caractère (" le sacrifice qui est digne de toi et qui sauve le monde "(26)), est une ample évocation du mystère de la Rédemption et de l’histoire du Salut. Ce qui frappe, c’est que cette Prière eucharistique suit les grandes phases du Credo ; elle débute par le récit de la création et s’achève sur l’évocation de l’envoi de l’Esprit " comme premier don fait aux croyants ". Ceci est une belle illustration du fameux Lex orandi, lex credendi, la loi de la prière est la loi de la foi, l’inverse étant tout aussi vrai.

On a souvent reproché aux nouvelles Prières eucharistiques de ne pas mettre assez l’accent sur le caractère sacrificiel de l’eucharistie, voire de l’omettre littéralement, en rapprochant ainsi la nouvelle messe d’une Cène protestante. On vient de voir que cette critique ne peut valoir pour les Canons III et IV (qui sont précisément les seuls vraiment " nouveaux "). Cependant il est vrai que la deuxième Prière eucharistique, du fait de sa grande brièveté, n’en fait pas explicitement mention. Mais c’est en toile de fond qu’est présent le sacrifice du Christ qui ne peut être dissocié de l’eucharistie, comme le rappelle incessamment le Concile qui emploie quarante quatre fois le mot sacrifice à propos de l’eucharistie(27). C’est ici la preuve que ce qui n’est pas dit n’est pas forcément nié, et que le doute n’est pas permis sur le caractère sacrificiel des nouvelles Prières eucharistiques. La variété des Prières eucharistiques permet justement une heureuse complémentarité entre elles. " Malgré sa brièveté, cette Prière est un riche condensé de tout le Mystère accompli dans l’eucharistie ; elle ne peut être bien comprise si l’on ne fréquente pas aussi les autres Prières, qui sont plus complètes "(28).

La concélébration

La concélébration, quand elle n’est pas assimilée à une pure hérésie, est souvent perçue comme une totale innovation. Commençons d’abord par voir ce qu’en dit le Concile. " La concélébration, qui manifeste heureusement l’unité du sacerdoce, est restée en usage jusqu’à maintenant dans l’Eglise, en Occident comme en Orient. Aussi le Concile a-t-il décidé d’étendre la faculté de concélébrer "(29). Ainsi d’emblée les textes du Concile indiquent que, non seulement la concélébration a été pratiquée dans le passé mais que l’usage ne s’en est pas perdu, même dans l’Eglise catholique romaine. En effet, la concélébration était un usage très courant aux premiers siècles et perdurera très longtemps – elle est encore attestée à la fin du moyen âge. Elle ne subsistera plus que lors des messes d’ordination. Il est intéressant de constater que le Canon romain conserve une trace de la concélébration ancienne dans la formule " C’est pourquoi nous aussi, tes serviteurs – les prêtres concélébrants –, et ton peuple saint avec nous... ".

Là encore, il subsiste nombre de réticences. La concélébration ne prive-t-elle pas Dieu de la gloire qui lui est due, un seul sacrifice étant offert là où plusieurs auraient pu l’être ? N’est-ce pas non plus manquer aux âmes, une seule messe étant offerte pour eux à la place de plusieurs ? Ces deux interrogations se rejoignent. En effet, elles sous-entendent que dans la concélébration les prêtres n’exerceraient pas la plénitude de leur sacerdoce et qu’ils n’offriraient pas individuellement la plénitude du sacrifice. Or ceci est faux. D’autant plus faux que le sacrifice eucharistique se réfère au seul et unique sacrifice du Christ, seul " sacrifice qui est digne de Toi et qui sauve le monde ", seule Offrande capable de rendre gloire à Dieu. Ce n’est donc en aucun cas priver Dieu de la gloire qui Lui est due que de concélébrer (comment l’Eglise pourrait-elle alors le recommander ?). Ce n’est pas plus manquer aux âmes car chaque prêtre concélébrant offre, tout comme dans une messe non concélébrée, une intention qui lui a été confiée et pour laquelle il reçoit une offrande.

Mais ceci ne répond pas à la question du bien fondé de la restauration de la concélébration. Qu’apporte-t-elle par rapport à la messe d’avant le concile ? N’est-ce pas plutôt un apport inutile qui ne fait qu’altérer le recueillement des célébrations ? Il convient ici de comparer ce qui est comparable. En effet, l’erreur fréquente consiste à prendre pour référence la forme privée, ou basse de la messe tridentine qui s’était petit à petit généralisée. En effet la " missa normativa ", c’est-à-dire la " messe de référence ", n’est pas cette messe privée, mais la messe dite " stationale ", qui est la messe célébrée par l’Evêque entouré de ses prêtres et de ses diacres. C’est autour de cette référence que s’articulent les autres niveaux de célébration, le plus simple étant la messe " privée ". On ne peut donc prendre cette messe privée comme élément de comparaison avec une messe concélébrée, car elle ne sont pas du même ordre.

Ainsi la concélébration à été rétablie pour mieux signifier cette unité du sacerdoce, et en particulier l’unité entre l’évêque et ses prêtres. " La liturgie est un univers de signes hiérarchisés et complémentaires ; c’est pourquoi, toutes choses égales d’ailleurs, la messe concélébrée dignement signifie et réalise mieux l’unité du sacrifice, l’unité du sacerdoce et l’unité de l’Eglise réunie au même autel, que des messes individuelles simultanées "(30).

L’usage du français dans la liturgie

L’usage de la langue vernaculaire dans les célébrations soulève souvent bien des réticences chez les traditionalistes. Voilà pèle mêle les objections les plus courantes : " Avec l’abandon du latin, langue de l’Eglise, son caractère universel se perd ". De plus, " c’est la porte ouverte à des erreurs de traduction et à des improvisations douteuses ". " Il ne faut pas oublier que c’est Calvin qui le premier a voulu célébrer en Allemand et à ce titre on se peut se demander dans quelle mesure cette introduction n’est pas une concession au protestantisme ".

La Présentation générale du Missel romain apporte un éclairage particulier sur cette question. Elle se plonge dans les textes et l’histoire du Concile de Trente. Il est difficile de résister à la tentation de citer un large extrait de cette Présentation: " Lorsque les Pères du IIe Concile du Vatican ont répété les affirmations dogmatiques du Concile de Trente, ils ont parlé à une époque bien différente de la vie du monde ; c’est pourquoi, dans le domaine pastoral, ils ont pu apporter des suggestions et des conseils que l’on ne pouvait même pas prévoir quatre siècles auparavant. Le Concile de Trente avait déjà reconnu la grande valeur catéchétique impliquée dans la célébration de la messe, mais il ne pouvait en tirer toutes les conséquences pratiques. Certes, beaucoup demandaient qu’il fut permis d’employer la langue du pays dans l’accomplissement du sacrifice eucharistique.

" Devant une telle requête, le Concile [de Trente], tenant compte des circonstances d’alors [la Réforme], estimant qu’il était de son devoir de réaffirmer la doctrine traditionnelle de l’Eglise, selon laquelle le sacrifice eucharistique est avant tout l’action du Christ lui-même : par conséquent, son efficacité propre n’est pas atteinte par la manière dont les fidèles peuvent y participer. C’est pourquoi il s’est exprimé de cette façon ferme et mesurée : " Bien que la messe contienne un riche enseignement pour le peuple fidèle, les Pères n’ont pas jugé bon qu’elle soit célébrée indistinctement en langue du pays "(31). Et il a condamné celui qui estimerait " qu’il faut réprouver le rite de l’Eglise romaine par lequel le Canon et les paroles de la consécration sont dits à voix basse ; ou que la messe doit seulement se célébrer dans la langue du pays "(32). Néanmoins, si d’un côté il a interdit l’emploi de la langue vivante dans la messe, d’un autre côté, il a prescrit aux pasteurs d’y suppléer par une catéchèse faite au moment voulu. [...]

" C’est pourquoi, rassemblé pour adapter l’Eglise aux conditions de sa fonction apostolique à notre époque, le IIe Concile du Vatican a scruté profondément, comme celui de Trente, la nature didactique et pastorale de la liturgie(33). Et comme il n’est aucun catholique pour nier que le rite accompli en langue latine soit légitime et efficace, il a pu concéder en outre que " l’usage de la langue vivante peut être souvent très utile pour le peuple " et il en a permis l’usage "(34).

Ce texte est d’une clarté sans équivoque et on pourrait le citer encore plus longuement, tellement il répond bien à la problématique que nous traitons dans ces pages. On y voit bien comment les directives du Concile de Trente et celles de Vatican II répondent à un même souci, et que leur antagonisme apparent n’est du qu’aux changements de conditions de l’époque. Ces conditions induisent une réponse appropriée de la part de l’Eglise, privilégiant tel ou tel aspect de la liturgie, parfois au détriment d’autres. Ceci répond donc au soupçon de " protestantisation " de la messe en montrant comment le Concile de Trente à agi en réaction à la Réforme entraînant, pour éviter toute contamination et confusion dans l’esprit des fidèles, l’interdiction de la langue vivante ; mais non pas en tant qu’hérésie ou même chose nuisible pour les fidèles puisqu’il convient que son absence comporte des inconvénients auquel il faudra suppléer. Le danger inhérent à l’époque de l’essor du Protestantisme ayant disparu, et les papes ayant souhaités, depuis saint Pie X, une plus grande participation des fidèles, l’introduction des langues vernaculaires se justifie pleinement.

De même que le parti adopté par le Concile de Trente comportait des inconvénients, celui pour lequel Vatican II a opté peut comporter les siens. Il est vrai que l’universalité de l’Eglise, qui ne se réduit d’ailleurs heureusement pas à l’usage de la langue latine, est peut être manifestée de manière moins éclatante à travers le monde par l’emploi de langues variées que d’une langue unique. Et il est vrai que le latin, qui d’ailleurs n’a pas été, bien au contraire, interdit par le dernier Concile, a certainement trop complètement disparu de nos célébrations, en particulier des célébrations internationales. Cependant, c’est pour le plus grand bien des fidèles, pour permettre une plus entière participation aux mystères sacrés et une plus grande intelligence des textes admirables de la liturgie et de l’Ecriture, que le Concile a encouragé cet emploi de la langue du pays.

La dernière objection part de la constatation que les textes de la liturgie sont plus facilement victimes de manipulations de la part du célébrant quand il sont dit en français. Là encore, faut-il juger une réforme par les excès qu’elle peut engendrer ? Projetons-nous dans la France du début du XIXe siècle. En cette période de plein gallicanisme, chaque diocèse pratique sa propre liturgie. Des textes écrits, en latin certes, par des ecclésiastiques pas toujours inspirés, remplacent ceux de la liturgie romaine. Qu’on entende Dom Guéranger évoquer ces missels qui " parlent comme le premier venu " ! La tentation de s’approprier la liturgie en en modifiant à son gré les textes et les rites a toujours été présente, aujourd’hui pas forcément davantage qu’autrefois. L’usage du français rend probablement plus flagrante cette tendance, mais il n’en est pas la cause.

Quant aux risques de mauvaises traductions, que certains considèrent comme s’étant réellement concrétisés, ils sont écartés par le Siège apostolique, qui, par l’intermédiaire de la Congrégation des rites, élabore et contrôle les traductions du latin, garantissant leur rectitude dogmatique. Il est vrai cependant que des améliorations sont toujours possibles, notamment pour pallier à des appauvrissements dus hélas à une certaine contamination de quelques commissions liturgiques par le fameux " esprit du concile " déjà évoqué. Ceci a conduit à la suppression de mots de vocabulaire et d’expressions jugés par trop désuets, et remplacés par quelques fadeurs et approximations. L’exemple de la traduction du Suscipiat Dominus est éclairant. " Que le Seigneur reçoive de vos mains le sacrifice à la louange et à la gloire de Son Nom, pour notre bien et pour celui de Son Eglise sainte "(35) en est la traduction littérale. Celle adoptée officiellement en diffère étonnement : " Pour la gloire de Dieu et le salut du monde ". Il s’agit bien là plus que d’une adaptation au langage actuel, mais bien d’une perte de sens. Cependant, jamais le contenu doctrinal n’est atteint dans sa substance, et c’est là une grâce de l’Eglise.

Ainsi la critique systématique du rite actuel n’est pas justifiée. Faut-il pour autant que les traditionalistes abandonnent le rite ancien ? Non, bien sûr. Car c’est là un élément de richesse que ces deux liturgies. Et cela ne brise pas pour autant l’unité de l’Eglise. A deux conditions cependant, c’est que le rattachement à un rite ne soit pas une manière de dénigrer l’autre et que les deux rites ne s’éloignent pas l’un de l’autre, comme le souligne le cardinal Ratzinger, afin de " mettre en évidence leur convergence intime " et non leurs divergences(36).

*

Si la reconnaissance du Concile Vatican II par les traditionalistes est la condition nécessaire à la réconciliation, ce n’est pas la seule ; et ce ne sont pas seulement les traditionalistes qui doivent faire un effort. Il y a aussi une conversion à opérer dans les Eglises diocésaines et parmi les fidèles. Notre dernière partie abordera les différents éléments pratiques et concrets devant permettre une intégration plus parfaite des communautés traditionalistes au sein des diocèses, après avoir mis en valeur certaines attitudes courantes parmi le Clergé et les fidèles qui compromettent la réconciliation.

Troisième partie

Communautés traditionalistes et diocèses : la réconciliation dans la pratique.

Dans cette partie, nous considérerons comme acquis la pleine acceptation du dernier Concile du Vatican par les communautés traditionalistes, ce qui est d’ailleurs le cas pour un certain nombre d’entre elles. Ainsi il est possible d’envisager un dialogue plus serein puis une collaboration au salut des fidèles, qui sont les premiers à souffrir des divisions, avec les évêques et les Eglises diocésaines. A condition toutefois que celles-ci s’y prêtent, ce qui n’est souvent pas le cas. En effet un certain état d’esprit envers la tradition et tout ce qui s’y rapporte, très répandu parmi les fidèles (et aussi le clergé), engendre une grande intolérance à l’égard de ceux qui restent fidèles à certaines formes traditionnelles, y compris celles qui n’ont pas été " abolies " par le Concile ou même qui ont été encouragées. Il est donc nécessaire et même urgent de restaurer l’amour de l’authentique tradition dans le cœur du peuple chrétien. Au-delà de la réconciliation des " traditionalistes " avec le Concile Vatican II et des " modernistes " avec la tradition, il est nécessaire que des actes concrets et des signes forts soient accomplis pour que l’unité de l’Eglise soit réelle et manifeste aux yeux de tous.

1. Pour une pastorale de la tradition

Le refus de la tradition

Au risque de se répéter, il est à constater que ce mouvement de contestation de la tradition est dû, là encore, à la contamination des mentalités de certains chrétiens par un esprit à l’opposé de l’Evangile, venu tout droit du " monde ". C’est l’esprit de révolution, hérité du mouvement de mai 68, illustré par ce fameux slogan : " Du passé faisons table rase ". Ainsi le Concile est-il perçu comme la victoire sur l’Eglise du passé, intolérante, obscurantiste et servile. Intolérante parce que prétendant détenir la vérité et l’imposant sous forme de dogmes par l’intermédiaire d’un pouvoir pontifical despotique, obscurantiste parce qu’anti-libérale en refusant la modernité et imposant une morale brimant la liberté, servile vis-à-vis des écritures et de la tradition.

Le pontificat de Pie IX, avec le " Syllabus " et le Concile Vatican I qui définit le dogme de l’infaillibilité pontificale, en éloignant les espoirs de réconciliation de l’Eglise avec le monde moderne, cristallise tous les motifs de désaccord. En revanche, le deuxième Concile du Vatican a été perçu comme un signe de ralliement au monde, à la modernité et aux idées nouvelles, marxisme en tête. Ne paraissait-il pas opposé en tout point à ce pontificat honni de Pie IX ? Ne prônait-il pas la collégialité, le dialogue avec le monde ? La liturgie n’était-elle pas le symbole de cette libération en permettant l’adaptation ?

Ainsi, plus de dogmes pesants : à chacun sa foi ! Plus de hiérarchie autoritaire : l’Eglise doit se démocratiser. Les sacrements sont des signes et non plus les actes presque magiques qu’ils étaient " autrefois ". L’obéissance au pape et la continuation de la Tradition n’étant pas respectueuses de la liberté de pensée de chacun, il faut s’en libérer. La liturgie est un acte uniquement généré par la communauté qui en est l’architecte.

Au-delà de ce trait à peine forcé d’une ligne dure qui se décline en de multiples variantes et subtilités, il reste que cet état d’esprit a trouvé de larges échos parmi les catholiques, à des degrés divers. Ceci a engendré un état d’esprit presque généralisé de méfiance envers la tradition et de " l’Eglise du passé ", qui rassemble tout ce qui est honni.

On ne voit que trop ce que cet état d’esprit a engendré comme abandons dans la vie quotidienne de l’Eglise : abandon d’une part importante du patrimoine artistique de l’Eglise – ornements, vases sacrés, chant grégorien, etc. – , abandon de toutes les formes extérieures de foi ou de dévotion tel que le port de la soutane par exemple ou encore les processions. Plus grave encore, ce sont des pratiques comme l’adoration eucharistique ou le sacrement de pénitence sous sa forme individuelle que l’on a refreinées ce qui porte préjudice à la perception même des sacrements. On ne voit plus non plus la nécessité d’adhérer aux dogmes et à la morale traditionnelle de l’Eglise.

Ce phénomène n’est sans doute pas ignoré des évêques, mais on peine à trouver parmi leurs orientations pastorales une petite part pour la pastorale de la Tradition, alors qu’elle mériterait une place d’honneur équivalente à celle que lui accorde le Concile. Et même plus encore puisqu’elle doit reconquérir l’estime du peuple chrétien, qu’elle à largement perdue depuis les années soixante.

La tradition vue par le Concile

Avant d’instituer une quelconque réforme, Le Concile se réfère et fait appel systématiquement à la Tradition de l’Eglise ; de même base-t-il les règles d’interprétation des saintes Ecritures et de la " sainte théologie " sur cette même Tradition(37), hautement estimée. Plus encore, dans la Constitution dogmatique Dei Verbum, le Concile dit toute l’importance de la tradition dans la vie de l’Eglise et s’appuie précisément sur celle-ci pour en donner une définition juste. Il convient de citer ici abondamment le texte même du Concile :

" Ce qui a été transmis par les Apôtres embrasse tout ce qui contribue à diriger saintement la vie du peuple de Dieu et à accroître sa foi ; ainsi l’Eglise, dans sa doctrine, sa vie et son culte, perpétue et transmet à toutes les générations tout ce qu’elle est elle-même, tout ce qu’elle croit.

" Cette tradition qui vient des apôtres se développe dans l’Eglise sous l’assistance du Saint-Esprit : grandit en effet la perception des choses et des paroles transmises, par la contemplation et l’étude qu’en font les croyants qui les gardent dans leur cœur, par la pénétration profonde des réalités spirituelles qu’ils expérimentent, par la proclamation qu’en font ceux qui, par la succession épiscopale ont reçu le charisme assuré de la vérité. L’Eglise, à mesure que se déroulent les siècles, tend toujours à la plénitude de la vérité divine, jusqu’à ce que les paroles de Dieu reçoivent en elle leur consommation.

" Les propos des saints pères attestent la présence vivifiante de cette tradition, dont les richesses se déversent dans la vie de l’Eglise vivante et priante. C’est par la même Tradition que le canon des Saints livres se fait connaître dans sa totalité à l’Eglise ; c’est en elle que les Saintes lettres elles-mêmes sont comprises de façon plus pénétrantes et sont rendues infiniment actives ; c’est ainsi que Dieu, qui a parlé jadis, s’entretient sans arrêt avec l’épouse de son fils bien aimé, et que l’Esprit-Saint, par qui la voix vivante de l’Evangile retentit dans l'Eglise et par l’Eglise dans le monde, introduit les croyants en tout ce qui est vérité, et fait résider chez eux en abondance la parole du Christ.

" […] Ce n’est pas par la Sainte Ecriture toute seule que l’Eglise puise la certitude qu’elle a sur tout ce qui est révélé. C’est pourquoi l’Ecriture et la tradition doivent être reçues l’une et l’autre avec un égal sentiment de piété, avec un égal respect.

" La tradition sacrée et la sainte Ecriture constituent l’unique dépôt sacré de la parole de Dieu qui ait été confié à l’Eglise. […] Mais la charge d’interpréter fidèlement la parole de Dieu écrite ou transmise a été confiée au seul magistère vivant de l’Eglise (38)".

On voit l’importance primordiale que le Concile donne à la Tradition " présence vivifiante " et vivante, ainsi que gage indispensable de la vérité. Ainsi est-il vraiment nécessaire d’effectuer une pastorale tant vis-à-vis des fidèles que du clergé. Elle devra veiller à faire cesser tout combat contre les formes plus traditionnelles de liturgie. Il est à souhaiter que les évêques prennent une position très claire dans ce sens, en permettant largement la célébration de l’ancien rite et plus encore en favorisant la célébration du nouveau de manière plus traditionnelle(39), répondant en cela au désir profond de nombreux catholiques, ainsi qu’en rappelant incessamment la doctrine traditionnelle de l’Eglise.

Tradition et traditionalismes

La lecture de l’extrait de Vatican II suscite deux réflexions. La première concerne le caractère vivant de la Tradition, et la deuxième, la distinction entre la grande Tradition et les traditions partielles.

La Tradition n’est pas à considérer d’abord comme passive mais comme active. Elle " grandit " et " tend vers la plénitude de la vérité divine " et elle reste, par la grâce du " magistère vivant de l’Eglise ", l’expression authentique de la foi catholique. Ainsi les pratiques religieuses doivent-elle être mises en harmonie avec l’enseignement du magistère. Dans cette optique, une nouveauté instituée par le magistère ne s’oppose pas à la Tradition, mais est plutôt l’essence de son développement, pour tendre vers la plénitude de la vérité.

Au sein de cette grande Tradition se développent des traditions partielles – locales, liées à un ordre particulier ou à une spiritualité donnée – qui viennent enrichir la vie ecclésiale. La légitimité de celles-ci suppose qu’elles soient en harmonie avec le magistère, approuvées par lui. Le traditionalisme, dans son acception péjorative, consiste à prendre une tradition partielle pour la grande Tradition.

La tradition tridentine fait partie de la Tradition vivante de l’Eglise à la manière d’une chaîne appelée à être prolongée par d’autres maillons. Si les vieux maillons perdurent à côté des nouveaux, ils ne sont pourtant plus la chaîne entière. Ainsi la tradition tridentine est-elle devenue une tradition partielle en tant qu’expression d’une certaine spiritualité, et ne constitue pas à elle seule la grande Tradition de l’Eglise, comme le sous-entendent bien de traditionalistes, induisant une conception de la Tradition indépendante du magistère de l’Eglise.

Ainsi Jean-Paul II dans le Motu proprio Ecclesia Dei de 1988 constate qu’" à la racine de cet acte schismatique [de Mgr Lefebvre], on trouve une notion incomplète de la Tradition. Incomplète parce qu'elle ne tient pas suffisamment compte du caractère vivant de la Tradition qui, comme l'a enseigné clairement le Concile Vatican II, " tire son origine des apôtres, se poursuit dans l'Eglise sous l'assistance de l'Esprit-Saint ; en effet, la perception des choses aussi bien que des paroles transmises s'accroît, soit par la contemplation et l'étude des croyants qui les méditent en leur cœur, soit par l'intelligence intérieure qu'ils éprouvent des choses spirituelles, soit par la prédication de ceux qui, avec la succession épiscopale, reçurent un charisme certain de vérité " ".Et le pape ajoute : " Mais c'est surtout une notion de la Tradition, qui s'oppose au Magistère universel de l'Eglise lequel appartient à l'évêque de Rome et au corps des évêques, qui est contradictoire. ".

C’est dans cette optique qu’accepter des changements ne constitue pas un reniement de la Tradition mais bien plutôt participer à la croissance en Dieu de l’Eglise. Et cela va beaucoup plus loin que des changements formels et touche toute la vie de l’Eglise et sa doctrine. Cela exige un discernement, une prudence et une patience bien à l’antithèse de ce qui s’est vu après le Concile ; mais une attitude d’immobilisme est tout aussi dommageable à la croissance harmonieuse de l’Eglise. C’est ainsi que l’abbé Christian Laffargue constate qu’" en dehors et au-delà de tous les excès et les scandales issus des réformes post-conciliaires, l’Eglise du Christ continuait de progresser spirituellement et intellectuellement, de façon cachée. […] Ce travail de la grâce sera clairement manifesté dans le Catéchisme de l’Eglise Catholique. "

Il ajoute : " Il nous fallait rattraper le temps perdu au lieu de manifester un attachement nostalgique exacerbé à l’Eglise antéconciliaire et d’idéaliser le passé. J’adhère tout à fait à l’idée émise par le pape dans son homélie à Reims, en septembre 1996, selon laquelle ‘l’Eglise doit être l’Eglise du temps présent’. La liturgie traditionnelle est vécue par beaucoup de prêtres et de fidèles comme partie intégrante d’un passé parfait vers lequel ils veulent revenir, alors qu’au contraire cette tradition liturgique immémoriale, injustement et scandaleusement combattue depuis trente ans, reste un don et une richesse pour l’Eglise d’aujourd’hui, une référence pour notre temps. "

Ainsi nous faut-il envisager, principalement dans la liturgie qui est le centre de tout, ce qui peut et doit être modifié pour suivre la marche – non achevée ! – de l’Eglise vers la perfection, tout en gardant ce " trésor multiséculaire " qu’est la liturgie tridentine.

2. Intégrer la réforme liturgique dans le cadre de la liturgie tridentine

Le cardinal Ratzinger le dit bien dans son discours pour les dix ans du Motu proprio Ecclesia Dei : " Voilà pourquoi il est si important d’observer les critères essentiels de la Constitution sur la Liturgie, que j'ai cités plus haut, aussi si l’on célèbre selon le Missel ancien ! " : il est nécessaire tout autant que réalisable de célébrer la liturgie tridentine d’une manière fidèle au concile. Le cardinal avec raison demande de ne pas considérer comme primordiales des questions secondaires tel que l’orientation du célébrant ou la langue utilisée. Nous avons vu en revanche quels étaient les points essentiels sur lesquels le Concile a insisté : une plus grande participation des fidèles, importance accrue donnée aux Saintes Ecritures, etc. Ce n’est pas renier l’ancienne liturgie que d’intégrer ces enrichissements.

Le calendrier liturgique

La communion entre les fidèles des deux rites est perturbée par l’existence des deux calendriers liturgiques. Quoi de plus important pour la vie quotidienne de l’Eglise que la célébration des saints dans sa liturgie ? Quoi de plus triste que de voir deux communautés désunies dans l’invocation de ses Saints ? Mais pourquoi donc refuser le nouveau calendrier ? La réforme du calendrier n’est pas chose rare dans la vie de l’Eglise, ne serait-ce que pour intégrer les nouveaux saints et martyrs (quand fêterons-nous sainte Edith Stein ?), et n’est pas forcément lié à un rite particulier. On ne peut dire non plus qu’il n’est pas légitime de la part du Siège Apostolique de procéder à un tel changement.

Le nouveau calendrier supprime, il est vrai, quelques octaves, ajoutées en surnombre au cours des siècles, pour revaloriser celles qui prolongent les deux fêtes principales : Pâques et Noël. On pourrait tomber dans la facilité du slogan en disant : " trop d’octaves tue l’octave ", et ce ne serait pas si faux. On a beaucoup récrié la suppression de l’octave de Pentecôte, allant jusqu’à dire qu’une telle suppression est la preuve de la dérive simplificatrice du Concile, et plus encore qu’elle démontre la " perte de la catholicité dans l’Eglise " (authentique) ! Outre la raison évoquée ci-dessus, une autre s’ajoute, particulière à la Pentecôte : le temps pascal durant parfaitement et symboliquement cinquante jours, il semblait plus logique de cesser les festivités à son terme, et de finir ainsi sur le point culminant de la venue de l’Esprit-Saint. Le temps " ordinaire " s’en retrouve valorisé, pour une plus grande richesse de vie liturgique.

Le nouveau calendrier veut donner toute sa place à la célébration des saints, en cherchant à mieux faire coïncider la fête du saint avec la date historique de sa mort. Des communautés célébrant l’ancien rite, tels les bénédictins de Fontgombaut, ont compris l’importance d’un calendrier unique pour la communion avec toute l’Eglise, et utilisent le calendrier actuellement en vigueur tout en célébrant la liturgie tridentine. C’est à la fois la preuve que la mesure est concrètement envisageable, et un exemple à suivre. Il faut vraiment souhaiter que cet usage se généralise.

Participation des fidèles et " sens du sacré "

Afin de permettre une meilleure participation des fidèles à la messe, données doivent être prises en compte. Le cardinal Ratzinger reconnaît " que la célébration de l’ancienne liturgie s’était égarée trop dans le domaine de l’individualisme et du privé, et que la communion entre prêtre et fidèles était insuffisante "(40). Le Concile en avait conscience et a tenté d’y remédier, par exemple en faisant prononcer les paroles du canon à voix haute. Il faut donc être attentif, si l’on garde l’ancienne manière de célébrer, à ne pas retomber dans l’excès de l’individualisme.

Participation des fidèles et respect du sacré, sont souvent mis en opposition. Les liturgies actuelles sont fréquemment accusées à juste titre souvent d’occulter le sens du sacré par un trop grand flot de paroles. Cela vient d’une confusion entre participation des fidèles et animation de la messe par quelques-uns uns d’entre eux, générant un bavardage liturgique incessant. Mais que dire d’une liturgie où les fidèles, déconnectés de l’action sacrée se déroulant à voix basse à l’autel, chantent par exemple un chant à Marie pendant la Doxologie ? Et le fait n’est pas rare, faisant preuve là aussi d’un réel manque de sens du sacré, de sens liturgique.

Ainsi, est-il nécessaire d’attirer particulièrement l’attention des fidèles de rite tridentin sur la participation pleine, même si elle est silencieuse, à l’action sacrée, et avant tout à la consécration, suivant pas à pas les actes et paroles du prêtre en s’imprégnant de leur signification, sans autres actes en parallèles, chant, chapelet, prières pendant la messe, etc., qui n’ont pas leur place ici.

La richesse des Ecritures

Certaines communautés de rite tridentin comme les bénédictines de Jouques ont adopté, à la demande de leur évêque, les cycles de lectures mis en place par la réforme liturgique, ces lectures étant dites en français, selon la volonté du Concile. Ceci n'a pas toujours été facile à accepter par ces communautés. Mais force est de constater que ces " adaptations " sont très justifiées. D'une part, tout en ne dénaturant en rien le rite tridentin, l'adoption du français pour les lectures permet de répondre à l'exigence du concile de favoriser la bonne intelligence des textes par les fidèles ; Et d'autre part, de l'aveu même des membres des communautés concernées, les nouvelles lectures sont une nourriture spirituelle très riche. Elles sont en effet incomparablement plus variées que les anciennes puisque la majeure partie de l'Ecriture est lue en deux ans pour les messes de semaine et en quatre ans pour les dimanches et fêtes. Plus profondément encore, c'est un élément très important pour la communion ecclésiale, l'Eglise entière méditant en même temps sur les mêmes textes de la Sainte Ecriture.

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Voila donc quelques élément concrets parmi les plus importants qu’il est indispensable de prendre en compte pour que le rite tridentin reste vivant au contact de la Tradition active de l'Eglise, et puisse jouer tout son rôle d'enrichissement de la vie ecclésiale. Ainsi, la tradition tridentine prendrait sa juste place, et toute sa place, au sein de la grande Tradition de l'Eglise et non comme étant cette Tradition elle-même. C'est dans cette perspective qu'il serait bon d'abandonner l'expression de " liturgie traditionnelle " pour désigner le rite tridentin, non parce qu'elle dit que le rite tridentin est traditionnel, mais parce qu'elle suppose que la liturgie nouvelle ne l'est pas.

Il ne faut pas prendre, comme le dit bien le cardinal Ratzinger, ces tentatives d'harmonisation entre les deux rites comme une ruse destinée à faire disparaître à terme le rite tridentin – ou plus encore les " tradis " eux-mêmes –, mais bien au contraire comme le moyen de lui donner toute la place qui lui est due, en l’intégrant parfaitement à la vie de l'Eglise. Ceci n'est possible que si la fidélité aux Conciles de Trente et de Vatican I est complétée par celle au Concile Vatican II, et si la perpétuation du rite tridentin n’est pas justifiée par le refus de la nouvelle liturgie.

Ainsi, il faut éviter par-dessus tout que les deux rites évoluent dans deux sens différents, et si cela est déjà fait, alors il faut que des efforts soit fait pour que cela soit réparé. La liturgie n’est pas celle d’une communauté ou d’une paroisse. Chaque catholique doit pleinement s’y retrouver, même s’il existe des accents spirituels différents.

Un des fruits, ou peut-être le fruit majeur, de cette cohabitation harmonieuse entre les deux formes (l’ancienne et la nouvelle) du rite romain, est la biritualité, qui consiste à ce qu’un même prêtre célèbre dans les deux rites. Elle est en effet à la fois la preuve de la bonne acceptation réciproque des deux rites et le gage de bonne communion entre les deux. Ainsi, les réticences qui entravent encore aussi bien l’assistance par les fidèles que la célébration par les prêtres de cérémonies dans l’autre rite, montre encore, s’il le fallait, combien la réconciliation entre les deux rites n’est pas encore réalisée. Ce biritualisme sera le fondement d’actions pastorales communes, de célébrations communes, pour le plus grand bien des fidèles.

Conclusion

En ce jubilé de l'an 2000, où le pape Jean-Paul II nous invite à l'unité pour le service de la nouvelle évangélisation, il est plus qu'urgent que toutes les forces de l'Eglise s'unissent. La mission ne peut se passer de toute la jeunesse, l'élan et la foi des communautés de rite tridentin qui ne peuvent être féconde qu’en pleine communion avec l’Eglise. C'est pourquoi les évêques et les prêtres doivent à tout prix cesser d'hésiter à accueillir complètement, et pas seulement à tolérer, les communautés restées fidèles à l'ancienne liturgie. Un bon nombre de ces communautés attendent beaucoup de la hiérarchie de l'Eglise qui doit les aider à trouver le bon équilibre entre leur exigence de fidélité et l’application de Vatican II.

La pleine communion ne se fera pas si l’unité n’est recherchée que concrètement ou uniquement à propos de la liturgie. Car c’est au fond du cœur de chacun que doit s’opérer l’amour du Concile et l’amour de la Tradition qui sont les deux piliers de la réconciliation.

Le renouveau de l'Eglise que le pape appelle de tous ses vœux pour le troisième millénaire ne peut se faire que dans la vraie Tradition de l'Eglise dont le Concile Vatican II est le prolongement. Aujourd'hui où le magistère est particulièrement attaqué et où la Tradition est tant dénigrée, les traditionalistes ont un exemple à donner de fidélité tant à l'un qu'à l'autre.

Que la liturgie tridentine soit vécue par tous comme un enrichissement de la vie ecclésiale autour des évêques et du pape, et que le Concile Vatican II, en tant que continuation de la Tradition de l’Eglise et des précédents conciles, soit aimé et vécu par tous, voilà ce que l’on peut souhaiter de plus beau pour l’Eglise du troisième millénaire !

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1. Conc. Vat. II, Const. Dogm. Lumen gentium chap.1, no 8

2. Conc. Vat II, Const pastorale. Gaudium et Spes chap IV, no40, 2

3. Conc. Vat. II, Const. Dogm. Lumen gentium, chap II No17

4. Conc. Vat. II, Décret Unitatis Redintegratio, chap II, No11

5. cf. " Cinq propositions pour l’Eglise de l’an 2000 ", par le groupe " Paroles " La Croix du 26 janvier 2000

6. Conc. Vat. I, Const. Dogm. Pastor aeternus, chap 4

7. Const. Dogm. Dei Verbum n° 1, Avant-propos

8. Dei Verbum chap II, n° 10

9. Jean-Paul II, Motu proprio Ecclesia Dei, 1988

10. Vittorio Messori & card. J. Ratzinger, Entretiens sur la foi.

11. Cf. la deuxième partie de notre essai.

12. ed. Sainte-Madeleine

13. cf. Présentation générale du Missel romain, 1975

14. St Pie X, Motu proprio Abhinc duos annos -23 octobre 1913

15. St Pie X, Motu proprio Tra le sollecitudini dell’officio pastorale, 22 novembre 1903

16. cf. Jean-Paul II, Lettre apostolique pour le 25e anniversaire de la Constitution dogmatique sur la sainte Liturgie

17. désormais notée S.C.

18. S.C., no21

19. cf. J.P. II, Lettre apost. pour le 25e anniversaire...

20. S.C. No34

21. S.C. No51

22. S.C. No50

23. S.C. No23

24. cf. J.P.II, Lettre pour le 25e anniversaire...

25. En particulier la tradition apostolique par saint Hippolyte, IIIe siècle.

26. Missel romain, IVe Prière eucharistique.

27. cf. Père A. Bandelier, Simples questions sur la messe et la liturgie, ed. C.L.D.

28. Dom Robert Le Gall, La messe au fil de ses rites, ed. C.L.D

29. SC n° 57

30. Dom Le Gall, La messe au fil de ses rites, op. cit.

31. Session XXII, doctr. du sacrifice de la messe, chap 8

32. ibid. can. 9

33. SC no 33

34. SC no 36

35. Ordo Missae, 1975

36. Card. Ratzinger, Dix ans du Motu proprio, 1998

37. cf. Const. Dogm. Dei Verbum, no12, no24 ; Sacrosanctum Concilium, no23

38. Const. Dogm. Dei Verbum, nos 9, 10,11

39. Bien des traditionalistes seraient étonnés de constater qu’il est difficile de distinguer une messe de St Pie V d’une messe de Paul VI, si celle-ci est célébrée en latin et même dos au peuple, ce qui est strictement fidèle au Concile.

40. Dix ans du Motu proprio, 1998